C'est assez

Tentative de retrait des menus et de protection du gibier aquatique sauvage

19 juin 2020

Le déclin mondial des stocks de poissons pousse les petits pêcheurs à s’attaquer aux mammifères marins, tortues et oiseaux. Une convention internationale a sonné l’alarme. Aux gouvernements locaux de protéger ces espèces.

Cétacés abattus, probablement des globicéphales (Globicephala melas), à Vágur, îles Féroé, 2005. Photo Erik Christensen

  • L’expression « gibier aquatique sauvage », ou « gibier marin », se réfère à la chasse des mammifères, reptiles et oiseaux marins et aussi des requins et des raies.
  • Cette chasse se pratique dans le monde entier et elle a augmenté ces dernières années, depuis que les petits pêcheurs n’ont plus accès au poisson et autres ressources marines.
  • En février, les délégués de plus de 80 pays ont pris des mesures pour remédier au problème de la viande aquatique sauvage lors de la conférence de la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage qui s’est tenue à Gandhinagar, en Inde.
  • La conférence a également abouti à l’ajout de dix nouvelles espèces aux listes des espèces protégées de la Convention (dont le jaguar et l’éléphant d’Asie), à la reconnaissance d’une culture des animaux sauvages, et la demande que les espèces migratrices soient prises en compte par les politiques climatiques et énergétiques nationales.
Les scientifiques et les défenseurs de la nature expriment depuis longtemps leur inquiétude sur la consommation de la viande de brousse, conscients de son impact sur la faune sauvage et sur la santé humaine. Cependant, la question de la faune marine a reçu relativement peu d’attention, alors même que l’amenuisement des ressources a conduit les petits pêcheurs de régions telles que l’Afrique de l’Ouest à se tourner vers les dauphins, tortues de mer et autres mammifères, reptiles et oiseaux marins considérés comme « gibier aquatique sauvage ».

Lamantin en Afrique de l’Ouest. Crédit photo Maximin Djondo.
Des délégués représentant plus de 80 pays ont pris des mesures pour remédier à ce problème lors de la conférence de la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS) qui s’est terminée le 22 février à Gandhinagar, en Inde. Un accord a été obtenu pour développer un plan d’action pour l’Afrique de l’Ouest et pour coordonner les efforts de protection au niveau mondial des espèces concernées y compris, pour la première fois, de certains requins et des raies.

« La viande de gibier marin est en augmentation sur le marché et la CMS reconnaît qu’il s’agit d’une menace en forte croissance, à un niveau similaire à celle à laquelle font face les animaux terrestres, » a déclaré à Mongabay Fabienne McLellan, qui participait à la conférence en tant que co-directrice des relations internationales chez OceanCare, une ONG de protection marine basée en Suisse. « La population dépendante du gibier marin est en augmentation à travers les régions tropicales, tempérées, subarctiques et arctiques. Les baleines, dauphins, lamantins, tortues, crocodiles et oiseaux de mer sont donc de plus en plus ciblés en raison du déclin des stocks de poisson. »
Certains représentants d’ONG n’ont pas été complètement satisfaits des mesures prises par la CMS étant donné l’urgence qu’il y a à protéger ces espèces qui, pour nombre d’entre elles, ont un long cycle de vie et sont lentes à se reproduire. Mais ils ont exprimé l’espoir que ces mesures soient un point de départ pour un effort de protection plus important à l’égard des espèces marines ciblées par cette chasse.

Gibier aqua…quoi ?
Les scientifiques ont commencé à parler de gibier aquatique sauvage dans les années quatre-vingt dix et deux mille sous le nom de « viande de brousse marine ». Depuis, les menaces pesant sur ces espèces se sont multipliées. À travers le monde, près de 100 000 dauphins, marsouins et petites baleines d’au moins 56 espèces différentes sont tuées intentionnellement chaque année d’après un rapport de 2019 publié par un ensemble d’organisations de protection de la nature. Une étude récente montre que le nombre de petits cétacés tués à la chasse est en augmentation, y compris dans le bassin de l’Amazone et dans les eaux du Ghana.
La chasse n’est pas toujours motivée par un besoin immédiat de se nourrir. En Amérique latine et en Asie, la chair et la graisse des petits cétacés sont utilisées comme appât en raison de leur résistance sur les hameçons et de leur effet attractif sur les espèces de poisson recherchées. En Afrique de l’Ouest, l’huile de dauphin est recherchée comme onguent médicinal pour les enfants.
Certains types de chasse de gibier marin sont illégales, comme le braconnage des tortues de mer dans le Triangle de corail en Asie du Sud-Est. Néanmoins, c’est une chasse en grande partie légale. Nombreux sont les pays qui n’ont pas de réglementation pour protéger les espèces de gibier aquatique. (Le Marine Mammal Protection Act des États-Unis est une exception.)
Ainsi, de nombreux pays des Caraïbes n’ont aucune loi de protection des petits cétacés et des dauphins. Sur l’île principale de Saint Vincent et les Grenadines, la population chasse plusieurs centaines de petits cétacés par an d’après Russell Fielding, professeur en études environnementales délégué à l’université des Antilles à la Barbade (University of the West Indies in Barbados). 
Cette chasse attire moins d’attention que celle pratiquée sur Bequia, petite île des Grenadines, qui utilise une licence spéciale aborigène de la Commission baleinière internationale, organisme qui régule les prises de grosses baleines, pour capturer quatre baleines à bosse (Megaptera novaeangliae) par an. Cependant, la chasse pratiquée plus discrètement à Saint Vincent pèse beaucoup plus sur la biomasse, affirme Russell Fielding.

Manger de la viande d’animaux marins pose de sérieux problèmes de santé publique, ajoute-t-il. Les petits cétacés de la région sont des prédateurs supérieurs qui concentrent dans leurs tissus des polluants qui sont remontés le long de la chaîne alimentaire.

« Quand l’être humain consomme cette viande, nous devenons le prédateur ultime et nous ingérons tous ces polluants, » explique-t-il à Mongabay. Son étude démontre que les muscles, la graisse et les organes internes de ces animaux sont pleins de microplastiques et de polluants industriels comme le mercure. Tous les échantillons de petits cétacés testés par ses équipes ont affiché des niveaux de mercure supérieurs au seuil considéré sans danger par l’Organisation mondiale de la santé (avec une moyenne de 3 à 48 fois le taux limite recommandé).
Le professeur Fielding explique qu’après s’être consacré à la recherche uniquement, il est maintenant devenu un militant actif de la communication sur ces dangers. Cependant, à ce jour, les gouvernements des pays de l’est des Caraïbes n’ont pris aucune mesure pour freiner la consommation de cette viande de gibier marin.

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