C'est assez

Canada – Décès de la baleine à bosse de Montréal

12 juin 2020

Une baleine à bosse séjournait depuis le 30 mai dans le fleuve près du pont Jacques-Cartier à Montréal, une scène rare puisque la métropole québécoise est située en eau douce et à plusieurs centaines de kilomètres de l’habitat naturel du mammifère marin.


Les sauts du cétacé avaient attiré des centaines de curieux, et avait conquis le cœur des Montréalais. 

La baleine à bosse, une femelle âgée de 2 à 3 ans, a été retrouvée morte mardi matin, 9 juin,  près de Varennes . 


Une nécropsie de sa carcasse récupérée dans le fleuve Saint-Laurent a eu lieu mercredi et devrait permettre un diagnostic plus précis. 

L’analyse scientifique de la dépouille de la baleine à bosse de Montréal suggère fortement qu’elle est morte après avoir été frappée par un des nombreux navires commerciaux qui circulent sur le fleuve Saint-Laurent. L’animal, qui était en bonne condition physique au moment de sa mort, nageait directement dans la voie maritime dans les heures qui ont précédé son décès.

« L’animal présentait des signes de traumatismes possibles, soit des hématomes et des hémorragies, qui suggèrent fortement que l’animal a été frappé par un bateau », a résumé mercredi le Dr Stéphane Lair, qui dirige l’équipe vétérinaire qui a effectué la nécropsie de la jeune baleine femelle, à Sainte-Anne-de-Sorel. 

« Il est trop tôt pour confirmer notre hypothèse. Il va falloir terminer nos analyses », a-t-il précisé.

Chose certaine, la baleine à bosse qui a suscité la curiosité et l’émotion au cours des derniers jours était en « bonne » condition physique au moment de sa mort. Elle n’était pas amaigrie, elle ne présentait pas de problèmes apparents pour l’alimentation et elle ne semblait pas affectée par un problème de santé particulier.


« Ça nous suggère que sa présence dans le fleuve n’est pas associée à une maladie », a souligné M. Lair, un spécialiste des nécropsies de mammifères marins. Il a plutôt rappelé que les jeunes cétacés sont reconnus pour leur caractère « explorateur », ce qui peut les conduire en dehors de leur habitat normal. Qui plus est, la population de baleines à bosse est en augmentation depuis l’arrêt de la chasse commerciale qui a failli exterminer l’espèce. « C’est un succès, mais plus il y a de baleineaux, plus il y a de risques que l’un d’eux prenne de mauvaises décisions. »

Que s’est-il passé ? 

Avant d’être retrouvée morte et à la dérive, mardi matin, cette baleine de 10,2 mètres, pour un poids de 17 tonnes, semblait très dynamique samedi soir. Elle nageait alors près du pont Jacques-Cartier, entre l’île Notre-Dame et l’île Sainte-Hélène. 

La dernière observation de cette baleine vivante remontait à dimanche avant-midi, près de Pointe-aux-Trembles. Elle était alors directement dans l’étroite voie maritime, soit dans le secteur de navigation des nombreux cargos, vraquiers, porte-conteneurs et pétroliers qui descendent ou remontent le fleuve Saint-Laurent.

Pour le vétérinaire Daniel Martineau, pionnier dans la recherche sur les mortalités de cétacés dans le Saint-Laurent, il ne fait aucun doute que la vie de la jeune baleine à bosse était directement menacée dans cette « autoroute » de navires qu’est le fleuve Saint-Laurent.

L’analyse des cartes bathymétriques montre selon lui que le seul endroit où l’animal pouvait se déplacer se situait directement dans la voie maritime. « C’est un peu comme si on obligeait un chevreuil à circuler uniquement sur l’autoroute, en pleine nuit, en espérant qu’il ne se fera pas frapper par les camions. Son espérance de vie risque d’être très réduite », a-t-il illustré, en entrevue au Devoir. 

M. Martineau estime qu’il était justifié de « laisser l’animal tranquille », mais il juge qu’il aurait été nécessaire de déployer davantage d’efforts pour réduire le dérangement de cette baleine, ainsi que la menace que représentait la navigation commerciale.

Il croit notamment que la réglementation sur la navigation pour les plaisanciers n’était pas suffisamment stricte, à supposer qu’elle fût respectée. 

« Ils devaient maintenir une distance de 100 mètres de l’animal. En plein milieu urbain, c’est ridicule. Ce sont des animaux qui peuvent communiquer sur des centaines de kilomètres. Leur monde est basé sur le son, mais elle était constamment dans le bruit, entourée de béton. » Fait à noter : les navires commerciaux « en transit » ne sont pas tenus de respecter cette règle ni de ralentir à l’approche d’une baleine.

Daniel Martineau affirme surtout qu’il aurait été nécessaire d’assurer une surveillance en continu de cette baleine égarée, ce qui n’était pas le cas. 
Dès la tombée du jour, aucun observateur ne suivait ses déplacements. « Mais la navigation commerciale, elle, se poursuit toute la nuit. »

Pour remédier à cela, il aurait selon lui été possible d’installer une « balise à ventouse » sur le cétacé afin de pouvoir connaître sa position. « Ce genre de balise peut tomber rapidement, mais si elle peut fonctionner de 24 heures à 48 heures, ça peut faire la différence », souligne-t-il, en ajoutant que « Pêches et Océans Canada est légalement responsable de la protection des mammifères marins ».

Lire la suite de l’article sur Le Devoir 

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