A l’heure où les Etats-Unis et l’Union Européenne abolissent les spectacles de cétacés, les
parcs marins connaissent une forte progression en Chine, au grand désespoir des
défenseurs des droits des animaux. Un article de Lui Qin.
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Spectacle de dauphins au Chimelong Ocean Kingdom, à Zhuhai dans la province de Guangdong |
Un nombre croissant de cétacés est capturé afin de répondre
à la demande du secteur des parcs marins, qui connaît un essor rapide en Chine.
D’après un nouveau rapport, ces captures mettent en péril l’existence des
populations sauvages de mammifères marins.
En décembre 2015, une étude du China
Cetacean Alliance (CCA), une coalition d’associations de
protection animale, révèle que les parcs marins chinois sont impliqués dans la
capture de cétacés dans les eaux russes et japonaises. En outre, cette pratique
menace les populations sauvages de ces mammifères, qui sont transportés sur de
longues distances, fermement attachés par des filets.
Le rapport souligne que les parcs marins sont en forte
hausse en Chine. Depuis 2010, plus de 250 cétacés (des orques, des dauphins et
des marsouins) ont été capturés et transférés dans des parcs chinois. La
plupart des 114 bélugas détenus en Chine ont été capturés en mer d’Okhotsk
(Russie).
D’après le Dr. Naomi Rose du Animal Welfare Institute, la
captivité prive ces animaux d’activités
sociales et de stimulation. Cela engendre de sérieux troubles mentaux et physiques
ainsi que des comportements anormaux, et peut même causer la mort des animaux.
Les cétacés sont parmi les animaux les plus intelligents de
la planète. Les bélugas peuvent plonger pendant 25 minutes et atteindre des
profondeurs de 800 mètres. Les orques, quant à elles, vivent au sein de
structures sociales et familiales stables (aussi appelées « pods » ou
« gousses »), similaires aux organisations humaines.
Actuellement, il y a 39 delphinariums répartis dans 17 provinces chinoises,36 d’entre eux proposent des
spectacles de cétacés. Et 14 nouveaux parcs sont en construction. Le CCA estime
que ces parcs détiennent 491 animaux, parmi lesquels 114 bélugas et 279
dauphins qui attirent une foule nombreuse.
Le porte-parole de la coalition Hu Chunmei explique à Chinadialogue : « D’après
les bases de données de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de
faune et de flore sauvages menacées d'extinction) il n’y aurait que 2 orques en Chine. Par conséquent
les cinq autres ont été importées illégalement. A l’avenir, davantage d’orques seront importées pour les parcs
nouvellement construits. »
Selon les activistes de la protection animale, les animaux
sont forcés de participer aux spectacles de façon cruelle. Un dauphin à bosse
de l’Indo-Pacifique, captif dans le
Nanning Zoo, a été obtenu suite à un sauvetage sur une plage de Beihai, dans la
province de Guangxi au sud de la Chine. Il est maintenant utilisé pour les
spectacles et ce malgré des blessures visibles sur son rostre, selon le CCA.
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Un dauphin à bosse de l'Indo-Pacifique, ou dauphin blanc de Chine, a été sauvé sur une plage de Beihai.
Baptisée "Hope", elle se produit à présent dans des spectacles à l'Ocean Park de Hong Kong |
Des compagnies immobilières comme le groupe Haichang et le
groupe Hengda investissent dans la construction massive de parcs marins. Mlle
Hu rapporte que Haichang est le principal actionnaire du parc de Shanghaï, le
« Polar Ocean World », un des plus grands parcs en construction et
qu’il possède déjà d’autres parcs détenant des cétacés captifs à Dalian, Qingdao,
Tianji, Wuhan et Chengdu.
La captivité des cétacés est interdite au Royaume-Uni, en Croatie,
à Chypre et en Hongrie. Mais en Chine il n’existe aucune législation concernant
le bien-être des animaux, il n’y a donc aucune loi protégeant les animaux
captifs.
L’augmentation du nombre de
parcs en Chine continentale est alimentée par les touristes venus de Hong Kong
et de Taïwan, ce qui pousse les groupes environnementaux et les associations
locales de défense des animaux à interpeller Pékin pour mettre fin à cette
pratique.
Chen Yumin, directrice de la Société de l’Environnement et
des Animaux de Taïwan, s’implique dans la protection des animaux depuis 20 ans.
Elle nous a raconté qu’il y a 20 ans, une photo montrant un tigre se faire
massacrer exposée dans une rue de Taïwan avait suscité une vive indignation
publique. Aujourd’hui,
elle craint que ce soit les touristes taïwanais qui alimentent la demande en
nouveaux delphinariums à travers la Chine.
Les parcs de Taïwan sont désireux
de signer des accords avec leurs homologues continentaux afin de capitaliser
sur le marché du tourisme, en pleine expansion dans la région.
« Cela nous inquiète beaucoup, » dit Zhang Huijun,
la directrice exécutive de Kuroshio
Ocean Education Foundation à Taïwan. « Nous sommes venus à Pékin pour dire
que la cruauté ne
devrait pas faire partie des liens qui unissent Taïwan et le continent. »
Alors
que le nombre de parcs marins à Taïwan est en baisse, la publicité pour le
tourisme lié à cette activité sur le continent augmente rapidement, selon Mlle
Zhang. A la gare nord de Taipei, on peut voir un panneau publicitaire pour un
parc situé dans la province de Guangdong. Une autre étude montre que 263 sites
de tourisme taïwanais font de la promotion pour les spectacles de cétacés.
Chen Taichen de la Société
de Conservation des Dauphins de Hong-Kong partage ces inquiétudes. Il craint que
les partenariats croissants entre les aquariums du continent et l’Ocean
Park de Hong-Kong ne conduisent à augmenter le nombre d’animaux maltraités.
Les dauphins captifs ont un
taux de mortalité bien plus élevé que leurs congénères libres. En captivité, les
dauphins tursiops vivent en moyenne trois ans, contre 20 ans dans la nature.
En réponse à la pression exercée par les groupes de
protection animale, l’Ocean Park de Hong-Kong a cessé d’acheter des dauphins
blancs de Chine et des bélugas sur le continent. Le parc prétend également
qu’il a complètement cessé d’acheter des dauphins. Cependant, il poursuit la
reproduction en captivité et continue à emprunter des cétacés en provenance de
parcs du continent, deux pratiques qui devraient diminuer à l'avenir- si tant est que l'on sauve ces animaux.
Traduction: Carole et Marie / Vox Delphini
NB: Ceci est la traduction d'un article posté sur le site Chinadialogue. Certaines informations contenues dans cet article sont à relativiser, en ce qui concerne l'espérance de vie des dauphins tursiops et l'abolition progressive des delphinariums en Europe et aux Etats-Unis.